INFOS ÉDITEUR
Parution aux éditions Gaïa en janvier 2012 Parution aux éditions Babel Noir en avril 2013 Traduit du Norvégien par Loup-Maëlle Besançon Connaissez-vous Longyearbyen ? Un nom assez énigmatique pour cette capitale minuscule nichée dans l’archipel du Svalbard et plongée une grande partie de l’hiver dans la nuit polaire. C’est dans cette obscurité qu’un lourd manteau neigeux peine à éclaircir que la petite Ella disparaît. Le jardin d’enfants est pourtant bien surveillé, mais les petits aiment chahuter et se cacher sous la maison, entre les pilotis. Un homme rôde qui les observe. Des traces de pas dans la neige mènent droit à la mine de charbon. Située sur les hauteurs de la ville, cette mine est le centre de gravité de l’île. Chacun connaît dans son entourage un ou plusieurs de ses employés. Comment une si petite ville, d’à peine 2 000 habitants, pourrait longtemps cacher un criminel ? Le commissariat de Longyearbyen est plutôt engourdi par le manque de rotation des affaires à traiter… Rien de commun en effet entre cette disparition inexplicable et la routine des policiers : les chasses à l’ours en scooter des neiges – leurs couloirs migratoires menacent régulièrement de traverser la ville -, les petits trafics des pêcheurs contrebandiers ou encore le fléau de l’alcoolisme qui n’épargne pas tous les foyers… Epaulé par des agents venus de métropole, le commissariat parvient à recouper plusieurs pistes quand le père d’Ella disparaît à son tour. Nouvelle victime. (Sources : Gaïa – Pages : 288 – ISBN : 9782847202137 – Prix : 20 € – babel noir) |
L’AVIS DE SOPHIE PEUGNEZ
Une peinture sociale dans la nuit polaire.
Des enfants jouent dans la cour d’école bien à l’abri du regard des adultes. Certains ont élus domicile pendant la récréation au milieu des congères formées sous l’école. Parmi tous ces bambins, il ya Ella qui va être portée disparue. D’autant plus difficile à vivre pour sa maman qu’elle travaille également dans l’établissement scolaire.
La nuit polaire n’engloutit pas que les enfants, les adultes sont également dans un état second. Une des femmes arrivée depuis peu dans la petite ville a beaucoup de mal à s’adapter à l’ambiance étrange qui règne. Elle a le sentiment de perdre ses repères temporels, elle n’arrive à renouer des véritables affectifs avec son mari.
L’obscurité profite à certains qui tentent de devenir riches en se livrant à différents trafics.
Le lecteur devient un des nouveaux habitants de cette petite bourgade. Il apprend très vite à connaitre chacun, ses bons côtés et ceux qui sont cachés. Tenir toute la nuit polaire n’est pas facile, certains se réfugient dans l’alcool, d’autres dans des évasions extra-conjugales.
Mais ce qui marque le plus, ce qui effraie : c’est la mime toute proche. Elle a été synonyme d’âge d’or, de légendes. Elle est maintenant une cicatrice dans le paysage avec son poids de mystère.
« Le Sixième Homme » se lit dans un premier temps comme un roman de suspense puis je trouve que l’on passe plus dans le roman noir dans la seconde partie. On se focalise plus au début sur la disparition de la petite fille puis on va élargir son regard sur une société qui a du s’adapter à vivre sans lumière une partie de l’année.
On sens la morosité que vivent certains et on comprend pourquoi d’autres ont besoin de s’évader même si la morale n’est pas toujours au rendez-vous.
Mais dans cette petite communauté où tout le monde se connait, est-il possible qu’il y ait un meurtrier ?
Le portrait de la mine m’a touché, ce lieu est un personnage à part entière du roman. C’est comme une souveraine qui a brillé de toute sa splendeur et qui s’éteint à petit feu. La vieille dame est toujours présente mais est-ce que les nouvelles générations prêteront attention à elle ?
Il y aura encore certainement pendant longtemps des légendes qui l’entourent.
A noter que la sortie du roman de Monica KRISTENSEN s’est accompagnée de « La garçon dans le chêne » de Frederik EKELUND et de « Le baiser de Judas » d’Anna GRUE. Ces textes ont inauguré en 2012 la nouvelle maquette de la collection Gaïa Polar que je trouve très réussie. Cela donne un véritable coup de jeune à la collection. Des couvertures très attirantes (photographies, typographie).
L’AVIS DE MARIE H.
La petite Ella disparaît dans la nuit polaire de Longyearbyen. C’est la consternation et la stupéfaction dans cette petite ville de 2 000 habitants où tout le monde se connaît :
« Knut commençait à s’impatienter. Evidemment que la fillette ne tarderait pas à être retrouvée. Personne ne disparaissait au Svalbard. L’hiver, à l’exception du vol quotidien qui reliait l’archipel au continent, ils étaient pour ainsi dire coupés du reste du monde. Ils savaient donc parfaitement qui habitaient Longyearbyen, quels étaient les visiteurs et qui quittaient les lieux. » (p.28)
C’est un choc pour les trois policiers de l’île -Knut, Erik, et Tom -placés sous la tutelle du Gouverneur Anne Lise – qui sont davantage habitués à démasquer des contrebandiers ou à régler des disputes conjugales, à protéger la ville des ours polaires :
« Bon comme je vous le disais, il y a des gens en motoneige qui ont appelé parce qu’ils ont vu des ours polaires, une mère avec ses deux petits. Il semblerait qu’ils se dirigent vers Vestpynten et l’aéroport. Qui sait ? L’envie pourrait leur prendre de passer par Longyearbyen. Vous comprenez, l’odeur de nourriture des restaurants…Il vaudrait mieux que vous les chassiez de là, afin d’éviter que la mère ne se ballade dans toute la ville avec ses oursons. » (p.63)
La lecture de ce roman est un dépaysement total. Le décor est inédit. Toutes les particularités du Svalbard, archipel au Nord de la Norvège, sont décrites. Le lecteur se retrouve immergé dans l’extrême Nord, dans des paysages grandioses, dans la rudesse du climat et l’on perçoit combien le climat épuise la population lors des longues nuits polaires, combien il est difficile d’y rester : « De toute façon, personne ne s’installait ici définitivement. La durée des contrats de travail se limitait d’ordinaire à deux ou quatre ans. » (p.27)
L’auteur décrit avec beaucoup de réalisme cette petite ville avec beaucoup de précisions : les conditions de travail des mineurs, les conditions des pêcheurs, les situations de contrebandes (trafic illégal de rennes), la présence des ours polaires. La vie des habitants est liée soit à la mine, soit à la pêche et ces deux activités comportent des risques et des dangers. La mine devient elle aussi un personnage avec ses artères étroites creusées dans la roche, l’obscurité et la poussière. L’auteur joue ainsi de forts contrastes entre le noir de la mine et le blanc des ours, de la neige.
La construction du livre est très maîtrisée et l’auteure développe plusieurs histoires en parallèle (la recherche de la petite fille, l’histoire d’une femme trompée, un moment critique pour la mine de charbon) à partir de personnages très forts. Une auteure à suivre…