Présentation Éditeur
Erlendur revient ! Parti en vacances sur les terres de son enfance dans les régions sauvages des fjords de l’Est, le commissaire est hanté par le passé. Le sien et celui des affaires restées sans réponses.
Dans cette région, bien des années auparavant, se sont déroulés des événements sinistres. Un groupe de soldats anglais s’est perdu dans ces montagnes pendant une tempête. Certains ont réussi à regagner la ville, d’autres pas.
Cette même nuit, une jeune femme a disparu dans la même région et n’a jamais été retrouvée. Cette histoire excite la curiosité d’Erlendur, qui va fouiller le passé pour trouver coûte que coûte ce qui est arrivé… C’est un commissaire au mieux de sa forme que nous retrouvons ici !
L'avis de Sophie Peugnez
Il était une fois deux petits garçons qui se tenaient par la main…
Erlendur est sur les terres de son enfance. Il profite de ses congés pour faire le point, se ressourcer et trouver certaines réponses. Il loge dans la demeure de ses parents semi-abandonnée et il se promène dans les montagnes se souvenant du jour où il a lâché la main de son petit frère le perdant ainsi dans le brouillard.
Les lieux sont chargés d’histoire. Ici, des soldats ont également disparus dans le froid lors d’une tempête ainsi qu’une jeune femme du pays : Matthildur. Erlendur éprouve le besoin de savoir ce qu’elle est devenue. Il sait le poids d’une disparition notamment pour ceux qui restent.
Ce n’est pas une enquête officielle, c’est plus une quête proche des recherches généalogiques où il faut retrouver les noms, les liens pour tenter de retracer la vie de la disparue mais également celle de son mari.
J’ai trouvé ce texte d’Indridason magnifique. Loin de l’univers habituel d’Erlendur beaucoup plus sombre. Un vrai contraste avec « La Cité des jarres » que j’avais trouvé presque glauque, pesant malgré l’intérêt pour le personnage principal.
C’est un roman très intimiste. Et je ne pensais pas dire cela un jour d’un de ses textes, j’ai refermé cet ouvrage avec le sentiment d’être bien, apaisée.
Arnaldur Indridason dépeint le travail du deuil, la dualité entre l’envie de savoir et la peur de la vérité. La disparition, pouvoir dire une dernière fois au revoir, ou adieu, selon ses croyance. Savoir et accepter.
La difficulté pour les familles lorsqu’un corps n’est pas retrouvé de « s’autoriser » à tourner la page et à aller de l’avant malgré tout.
On découvre une Islande sauvage, très beau décor mais on peut également imaginer ce récit dans les fins fonds de la Normandie, de la Bretagne ou d’autres terres ancestrales. Les souvenirs de tous sont brouillés, lointains mais avec patience et écoute les événements se dessinent. Ce n’est pas l’enquêteur qui est en avant, c’est l’homme avec sa pudeur et sa ténacité.
C’est émouvant de revivre avec Erlendur ses souvenirs, de voir combien les drames peuvent rapprocher mais également définitivement séparer des êtres. Les murer dans le silence.
Le commissaire croise un chasseur de renards mais lui est plus proche de chasseur de papillons. Chasseur de souvenirs, il avance avec délicatesse tout en cheminant avec ses propres fantômes. Il épingle ses maigres indices sans jamais renoncer.
La nature montre son aspect sauvage, indomptable. Le cours d’eau que l’on voit ne risque-t-il pas de se transformer en Styx ? Sur quelle berge se trouve Erlendur ? Est-il déjà aux côtés des morts ou arrivera-t-il à les laisser derrière lui ?
« Etranges rivages » c’est un roman policier mais c’est également un récit mythologique, hors du temps. On découvre la genèse d’Erlendur et comment ses rapports aux autres ont pu le construire. Ce sont les récits des anciens qui sentant leur dernière heure venue ose enfin parler. Ce sont les on-dit des villages qu’il faut vérifier. Ce sont des voix qui se mêlent au vent dans la montagne…
Un dernier souffle glacé. Certains s’éveilleront, d’autres non….