Présentation Éditeur
igdis la farouche (1909) est l’histoire cruelle de l’amour qui unit Vigdis et Ljot l’islandais. Ce roman est inspiré des sagas islandaises, genre littéraire du Moyen-Âge : style précis et bref, dialogues mordants, destins tragiques, voici les ingrédients que reprend Sigrid Undset pour composer ce roman de jeunesse, qui est déjà celui d’un grand écrivain.
Les illustrations : Julien Brunet a réalisé des dessins minutieux, précis, qui produisent pourtant une atmosphère gonflée de rêve et de mystère. On perçoit dans ces illustrations la noirceur et la violence qui parcourent le roman, en même temps qu’une beauté nue, sensible dans la nature et dans le coeur des personnages peints par Sigrid Undset. Le travail de Julien Brunet, comme celui de Sigrid Undset, plonge dans des racines culturelles et artistiques : on y sent la réminiscence de postures et de gestes anciens, qui ont traversé l’histoire de l’art.
L'avis de Cathie L.
Sigrid Undset est une femme de lettres norvégienne née le 20 mai 1882 à Kalundborg au Danemark et morte le 10 juin 1949 à Lillehammer en Norvège. Figure incontournable de la littérature norvégienne, elle est mondialement connue pour ses romans, notamment la trilogie Kristin Lavansdatter qui la mènera sur le chemin de la conversion au catholicisme dans un pays éminemment protestant, et Olav Audunsson, pour lequel elle a obtenu le Prix Nobel de littérature en 1928. Elle est également l’auteur de nombreux essais et de centaines d’articles.
Le roman
Vigdis la Farouche, œuvre de jeunesse publiée en 1909 sous le titre Fortaellingen om Viga-Ljot og Vigdis, traduite par Marthe Metzger, est parue pour la première fois en France en 1954, cinq années après le décès de l’auteur. Elle a été rééditée en 1978 par les éditions Stock, puis en 2015 par les éditions de la Robe Noire.
Son père, le célèbre archéologue Ingwald Martin Undset, lui ayant transmis sa passion pour l’histoire, notamment pour le haut Moyen-Age scandinave, Sigrid Undset, en 1909, traduit la saga islandaise l’histoire de Viga-Ljot qu’elle adapte aussitôt sous la forme romanesque que l’on connaît. L’action se situe dans la Norvège médiévale à une époque non précisée, où le christianisme se mêle encore au paganisme,lui conférant l’atmosphère de légende qui s’en dégage. Les chapitres sont très courts, sous forme de scénettes, ce qui rend la lecture particulièrement aisée.
Selon Régis Boyer, grand spécialiste de la littérature et de la civilisation scandinaves, « une saga est un récit en prose, toujours en prose, ce point est capital, rapportant la vie et les faits et gestes d’un personnage, digne de mémoire pour diverses raisons, depuis sa naissance jusqu’à sa mort, en n’omettant ni ses ancêtres ni ses descendants s’ils ont quelque importance. » (Régis Boyer, L’Islande médiévale, page 189).
L’intrigue
Venus en Norvège pour affaires, Veterlide et son jeune neveu Viga Ljot sont hébergés chez Gunnar de Vadin, le temps nécessaire pour acheter le bois dont Veterlide a besoin dans son domaine, en Islande. Dès que Viga Ljot aperçoit Vigdis, la fille de Gunnar âgée de 15 ans, il tombe amoureux d’elle. Les deux jeunes gens s’entendent bien; pourtant, lors de son séjour, le jeune islandais se lie d’amitié avec les fils d’Arne, chef du clan ennemi de son hôte, ce que Vigdis, aussi sauvage que belle, ne peut accepter. Ainsi, bien qu’elle éprouve pour Viga Ljot des sentiments profonds, elle refuse sa demande en mariage.
Frustré par le refus de la jeune fille, il l’attire dans les bois et la viole. Quelques mois plus tard, elle donne le jour à un garçon recueilli par Skolder, le fils de sa mère nourricière. S’ensuivent divers événements qui auront pour conséquence la mort de Gunnar, l’incendie de sa ferme par Arne et ses fils et l’exil de Vigdis avec Ulvar, son fils âgé de quelques mois à peine. Dès lors, la jeune femme, qui impute à Viga Ljot la responsabilité de sa déchéance et de son exil forcé, vivra dans l’attente que son fils puisse un jour la venger.
Le contexte historique
Même si l’on sait que l’action de Vigdis la Farouche se situe dans le haut Moyen-Age, l’époque reste vague. Le seul repère précis est le contexte religieux: c’est au moment où le christianisme commençait à se répandre parmi les peuples du Nord, côtoyant néanmoins un paganisme encore bien ancré: Gunnar et sa famille croient en leurs dieux ancestraux alors que Veterlide et les siens sont chrétiens.
Les personnages
- Veterlide : homme venu du Ostfjord, région du centre de la Norvège, installé en Islande où il possède un domaine; oncle de Viga Ljot ; chrétien baptisé.
- Steinvor : sœur de Veterlide, épouse de Gissur Hauksson de Skomedal ; mère de Viga Ljot.
- Gissur Hauksson de Skomedal : époux de Steinvor, père de Viga Ljot ; mort assassiné.
- Viga Ljot : fils de Steinvor et Gissur ; cheveux noirs, yeux bleus profondément enfoncés dans leurs orbites, grande bouche aux lèvres pâles; haute stature, large de poitrine, mince de taille comme une femme, membres robustes et bien faits ; doué, avec les qualités d’un chef, consciencieux, il a le sens de l’honneur, peu loquace et solitaire ; chrétien baptisé tout comme son oncle.
- Gunnar de Vadin : bel homme de haute taille, longs cheveux, barbe grise ; il possède le plus grand domaine dans le fjord Folden, près de la rivière Flysja.
- Vigdis : jeune fille fort belle, bien bâtie, svelte, la poitrine haute, de grands yeux gris et les cheveux longs jusqu’aux genoux, brillants et épais, de couleur blond foncé; fille de Gunnar.
- Ulvar : fils que Vigdis a eu avec Viga Ljot.
- Kare de Grefsin : blond, grand et beau; très jeune ; ami d’enfance de Vigdis qu’il veut épouser.
- Aesa : ancienne esclave, mère nourricière de Vigdis.
- Skolder : fils d’Aesa.
- Uspak : marin islandais venu au secours de bateau d’Ulvar attaqué par les Ecossais alors que lui et ses hommes se ravitaillaient sur une île après une terrible tempête.
Les lieux
Dans les sagas, ce sont les personnages qui occupent le devant de la scène, les lieux ne servant qu’à amplifier le lyrisme nécessaire à la valorisation du héros. Ici, l’action se déroulant dans une région proche d’un fjord, les paysages sont souvent empreints de grandeur, voire de poésie, décor propre à magnifier les personnages :
« Au milieu du pré, s’élevait une petite colline. Il y poussait des sorbiers et des buissons d’églantine(…)Vigdis s’assit, croisa ses mains sur ses genoux et contempla le fjord qui brillait au sud dans toute sa beauté, à présent que le soleil descendait vers les montagnes. » (Page 55).
Mon avis
Ce qui est intéressant dans les œuvres de Sigrid Undset, et particulièrement ici dans Vigdis la farouche c’est que l’auteur traite de thèmes intemporels tels que l’amour humain, avec des joies, des préoccupations, des problèmes et des drames très proches de ceux que nous vivons chaque jour, même transposés dans une époque lointaine. D’ailleurs, le fait que l’histoire se situe dans la Scandinavie médiévale apporte une touche de légende, de grandeur mythologique, avec de beaux guerriers et des femmes au caractère bien trempés, capables d’actions nobles comme d ‘actions moins louables, marqués par le destin que les dieux leur ont alloué, tels Viga Ljot, profondément déçu par le rejet de celle qu’il aime, ne peut résister à ses pulsions, moment d’égarement qui le poursuivra toute sa vie.