Viktor Arnar INGOLFSSON : L’énigme de Flatey

Viktor Arnar INGOLFSSON : L'énigme de Flatey

Présentation Éditeur

Un corps quasiment à l’état de squelette est retrouvé par des pêcheurs sur un îlot isolé au large de Flatey, petite île située à une centaine de milles au nord de Reykjavík.

L’adjoint du préfet, Kjartan, dépêché pour prendre possession des restes et établir un rapport, n’a aucune expérience des enquêtes criminelles. Les habitants de l’île ne lui sont pas d’une grande aide et il faudra un coup de main de la police du continent pour établir que la victime était un universitaire danois spécialisé dans les sagas nordiques.

Une seule chose peut expliquer la présence, incognito, du professeur dans cette région reculée: le Livre de Flatey, compilation de textes du Moyen Âge relatant les aventures des rois de Norvège. Or la copie conservée sur l’île contient une énigme, sous forme de charade en quarante questions, dont tous les spécialistes cherchent en vain la clé depuis longtemps.

Ce qui n’explique pas pour autant qui, parmi ces pêcheurs frustes et travailleurs, pouvait vouloir sa mort.

Le Livre de Flatey doit toute sa saveur et son originalité à la description pittoresque du mode de vie d’une petite communauté vivant en autarcie de la pêche et de la chasse au phoque dans les années 60.

Viktor Arnar Ingólfsson est né en 1955 à Akureyri, au nord de l’Islande. Il est l’auteur de six romans policiers dont l’un a fait l’objet d’une série télévisée. L’Énigme de Flatey a été finaliste du prix Clé de Verre, prix de littérature policière nordique.

Origine Islande
Éditions Seuil
Date 7 février 2013
Éditions Points
Date 2 janvier 2014
Traduction Patrick Guelpa
Pages 384
ISBN 9782757838587
Prix 7,80 €

L'avis de Sophie PEUGNEZ

Nous sommes en juin 1960 et le corps d’un érudit danois est retrouvé sur un îlot non loin de l’île de Flatey où est conservé une copie du Livre de Flatey, saga du Moyen Age. Kjartan, jeune sous préfet inexpérimenté est envoyé à Flatey pour récupérer le corps et rédiger un rapport. Parallèlement à ce récit, on découvre la lente résolution de l’énigme du Livre de Flatey, composée de quarante questions.

Ce roman offre une chronique sur la façon de vivre sur une île en Islande en 1960, c’est à dire loin de tout. La vie y est rude et la gastronomie sommaire. « Un jour, j’ai connu quelqu’un qui ne mangeait pas de phoque, ni de cormoran, et le plus drôle c’est qu’il mangeait du poulet et qu’il trouvait ça bon. » Ce côté est intéressant et surtout très amusant.

L’Histoire avec un grand H de l’Islande est aussi abordée et j’ai appris beaucoup de choses.

L’intrigue se déroule calmement au rythme de la vie des Flateygiens avec quelques incursions à Reykjavik.

Bref, c’est un roman plaisant à lire et j’ai passé un bon moment.

Hélas, la résolution m’a déçue, ainsi que la résolution de l’énigme du LivredeFlatey. D ‘ailleurs pour cette dernière je n’ai pas du tout compris son intérêt, pour moi cela n’apporte rien au récit. En fait, je n’ai pas saisi où Viktor Arnar Ingolfsson voulait en venir.

Peut être que quelque chose m’échappe. L’auteur sera présent aux Boréales en novembre 2013 et j ‘aimerais l’entendre parler de son livre pour mieux comprendre.

L'avis de Cathie L.

Viktor Arnar Ingolfsson, né le 12 avril 1955 à Akureyri, important port maritime situé au nord de l’île, est un auteur islandais de romans policiers. Il est diplômé en génie civil et a suivi des cours de rédaction de scénario à l’université d’Islande de Reykjavik ainsi que des cours de relations publiques à l’université de Washington. Il poursuit deux carrières parallèles : depuis 1985, il supervise les publications de l’administration des transports d’Islande et, depuis 1978, a écrit six romans policiers, dont un seulement a été traduit en français.

L’énigme de Flatey, Flateyjargáta dans la version originale parue en 2003, a été publié en 2013 par les éditions du Seuil dans la collection Policiers. L’auteur prend le temps de situer les décors et de détailler les actions dans un style fluide et agréable à lire :

« Le trajet comportait des montées, mais cela n’était pas un inconvénient car le transport était aisé. Pormodur Krakur était à l’évidence bien bâti et n’avait aucun mal à tirer la voiture à lui tout seul. Les autres ne poussaient que pour la forme. Ils marchaient à pas lent, dignement, et les roues de la voiture crissaient légèrement au rythme de leurs pas. Il n’y avait pas à aller bien loin, mais Kjartan trouva qu’ils mettaient un temps infini à parvenir à destination. Pormodur Krakur ouvrit la porte de l’église avec une grande clé et le cercueil fut porté à l’intérieur. Au milieu, on avait disposé deux tabourets sur lesquels ils le déposèrent. » (Page 54).

Construction

Chaque partie représente un jour d’enquête ; les chapitres, assez courts, se terminent par un passage en italique, extraits du Livre de Flatey et des études menées sur cet ouvrage.

Fil rouge : le Livre de Flatey, compilation d’anciennes sagas rédigée dans le courant du XIVe siècle par un grand propriétaire terrien du nom de Jon Hakonarson, sans doute achevée vers 1394, selon les annales qui figurent à la fin du livre.

1960. Des pêcheurs découvrent un corps pratiquement à l’état de squelette dans les rochers d’un îlot isolé au large de Flatey, petite île islandaise située dans la baie de Breidafjordur, large fjord situé sur la côte ouest. Le jeune Kjartan, stagiaire chez le préfet dont dépend l’îlot, est envoyé sur place pour récupérer le corps et s’occuper de son acheminement vers Reykjavik, et rédiger un rapport.

Après avoir établi que le corps est celui d’un universitaire danois, spécialiste des sagas nordiques, reste à déterminer ce qu’il était venu faire en Islande, particulièrement sur ce rocher perdu en pleine mer. Sa venue avait-elle un rapport avec le Livre de Flatey et la polémique, alors virulente, autour de la question de sa restitution par les Danois à la nation islandaise, d’où le livre était originaire ? Ou était-il venu résoudre l’énigme de Flatey, sorte de mots croisés à déchiffrer à partir d’un code qui sert à vérifier la résolution correcte ?

Comment le corps a-t-il pu s’échouer dans les rochers, sur l’île de Kétilsey, très à l’écart des trajectoires des bateaux naviguant dans ces parages? Etait-il mort à ce moment-là ? A-t-il été victime d’un naufrage, d’un accident ou d’un meurtre ? S’il était vivant, comment a-t-il pu survivre sur ce rocher inhospitalier, inhabité, loin de l’itinéraire du ferry reliant les îles à la côte ? Après le meurtre sauvage de Bringeir, journaliste venu mener sa propre enquête, l’affaire est confiée à la police de Reykjavik.

La configuration particulière des lieux confère à cette enquête son côté inédit: mener des investigations sur une île mesurant seulement 0,5 km2, desservie une fois par semaine par le bateau postal, seul à assurer la liaison avec le continent, sont loin de constituer des conditions idéales, notamment pour le rapatriement du corps qui en attendant doit être stocké au mieux. Car pas de morgue sur l’île… Communications aléatoires, île coupée du monde en cas de tempête.

Flatey

Située dans le Breidafjordur, large fjord comprenant entre 2000 et 3000 îles et îlots, dont très peu sont habités (de nos jours, Flatey, la seule île habitée toute l’année, compte cinq habitants). Les conditions de vie y sont spartiates et entièrement dépendantes des ressources de la mer. La population, vieillissante, diminue d’année en année. Un entrepôt, une cabine téléphonique, une église, un cimetière… On en a presque fait le tour. On pourrait croire que les conditions d’investigations en sont facilitée, mais ce n’est pas le cas, car tout le monde ou presque possède un bateau qui permet d’atteindre un des innombrables îlots où l’on peut se cacher.

L’originalité du roman est que son intrigue est basée sur l’énigme posée par le Flateyjarbok, un manuscrit islandais rédigé de 1387 à 1394, et la compétition qui fit rage. Très richement décoré, il réunit un grand nombre de sagas, royales pour la plupart, intégrant des poèmes scaldiques, des poèmes eddiques ainsi que de courts textes historiques. Certaines de ces oeuvres ne figurent dans aucun autre ouvrage. D’où son importance. L’Islande étant sous domination danoise, le manuscrit fut envoyé au roi Frédéric III en 1656 par l’évêque Sveinsson, ainsi que le voulait la coutume. Il fut officiellement restitué à l’Islande le 21 avril 1971. L’auteur a construit son intrigue autour de l’énigme élaborée par un étudiant danois qui concocta un jeu de devinettes à partir des nombreux personnages y figurant :

« Il présenta alors une liste de quarante questions dont la dernière était le code qui validait les réponses justes à toutes les autres. Ce code comportait de surcroît un poème inachevé et la solution devait servir à élucider la fin de ce poème, c’est-à-dire les deux derniers vers. » (Page 168).

Une compétition féroce s’ensuivit, d’autant que personne ne parvint à élucider l’énigme. Est-ce la raison de la venue de Gaston Lund en Islande ??

L’intrigue de ce roman original et passionnant se déroule à une cadence lente, au rythme des occupations et des activités des habitants de l’île, endormant le lecteur dans une fausse torpeur, jusqu’au rebondissement final qui, d’un seul coup, accélère les événements. Sans oublier que, l’histoire se déroulant en 1960, les procédures policières étaient bien différentes de celles usitées de nos jours.

Cathie L.
Cathie L.http://legereimaginareperegrinareblog.wordpress.com
Ecrivain de romans historiques, chroniqueuse et blogueuse, passionnée de culture nordique et de littérature policière, thrillers, horreur, etc...
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